Rdv de la double compétence : Quatre visions pour la santé du futur          
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L'école de la double compétence
Technologique et manageriale

Quatre visions pour la santé du futur

Dans le cadre de ses Rendez-vous de la double compétence, Ionis-STM organisait une table-ronde dédiée à la santé, le mardi 23 février 2016. Le but de ce rassemblement ? Appréhender et comprendre l’apport des nouvelles technologies dans ce secteur voué à se transformer en profondeur ces prochaines années. Un véritable voyage dans le futur rendu possible par les interventions de quatre expertes : Christel Beltram, Ecosystem Developement, Innovation, Smarter Analytics & Watson Ambassador chez IBM France, Valérie Brouchoud, ancienne présidente de Doctissimo, Claude Larangot-Rouffet, médecin et Camille Vaziaga déléguée générale du think tank Renaissance Numérique. Découvrez leurs visions sur ce que sera la médecine de demain.

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De gauche à droite : Christel Beltram, Claude Larangot-Rouffet, Valérie Brouchoud, et Camille Vaziaga

Valérie Brouchoud : « Aujourd’hui, le patient est déjà connecté. Demain, ce sera au tour du professionnel de santé »
Site d’information santé connu de tous, Doctissimo est souvent mis en avant pour son fameux forum lancé en 2002. S’il est parfois tancé pour certaines questions saugrenues que l’on y trouve, ce dernier voit chaque jour des anonymes échanger sur leurs pathologies, leurs expériences, leurs craintes comme leurs sources de soulagement. Un véritable changement de l’approche de la maladie dont a été directement témoin Valérie Brouchoud, à la tête de Doctissimo jusqu’en 2015. « Ce forum répond à un réel besoin des patients, juge-t-elle. Quand on est malade et qu’on recherche des informations, on va désormais sur Doctissmo et on trouve des gens qui vivent la même chose que nous. Cela n’existait pas il y a 15 ans, quand le patient, après avoir vu le médecin, rentrait chez lui, restait seul, isolé, et grelottait dans son salon. Aujourd’hui, le patient est connecté et ce besoin de partage est devenu quelque chose d’indispensable dans la gestion de pathologies lourdes et chroniques. » Depuis prolongée « IRL » avec la création d’associations permettant d’échanger et de se soutenir face à la maladie, cette connexion née sur Doctissimo est un exemple révélateur de ce en quoi l’évolution technologique peut changer le combat face à la maladie, tant du côté des patients que des médecins. « Demain, le professionnel sera aussi connecté à travers une évolution radicale du paysage de la santé, poursuit Valérie Brouchoud. Avant, la santé était uniquement représentée par des médecins et des laboratoires pharmaceutiques. De nos jours, de nouveaux acteurs émergent : des SSII, des milliers de start-ups prometteuses, des grands groupes jusqu’ici non focalisés sur ce secteur, etc. Avec cette évolution, les patients reviennent également au centre du système, du dispositif : ils sont malades mais acteurs de leur prévention et de leur maladie. »

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Christel Beltram : « L’homme est l’un des générateurs de données les plus importants »
IBM fait partie de ces grands groupes qui s’intéressent de près à la santé et comptent bien changer les choses. Pour cela, la firme américaine ne lésine pas. C’est en tout cas ce qu’explique Christel Beltram qui, au quotidien, travaille dans une équipe ayant en charge de développer des partenariats technologiques et des écosystèmes. Une des dernières technologies sur laquelle IBM travaille depuis quelques années, c’est l’approche cognitive, traduite sous le nom de projet Watson. « Le concept du cognitif, c’est de reproduire le comportement humain à partir de systèmes, détaille Christel Beltram. Notre approche tend à créer des liens qui vont aller dans le sens de la qualité du soin au malade, en facilitant le travail de l’expert à chercher des informations plus complexes et plus nombreuses. »

« Data transforms our industries and jobs », rappelle-t-elle également. La santé n’échappe évidemment pas à la règle et ne pourra trouver son salut qu’en associant le Big Data à des projets comme Watson. « Dans la santé, les données proviennent des dossiers médicaux, des compte-rendus, des résultats de laboratoires, etc. En général, il s’agit de textes écrits par les médecins et chercheurs, c’est-à-dire de données non structurées. Pour les traiter et les exploiter, le cognitif est utile. D’autant plus que l’homme est l’un des générateurs de données les plus importants : en 2020, chaque personne produira 7 GB de données par seconde ! » Pour autant, pas besoin d’atteindre 2020 pour voir IBM déjà utiliser les données à bon escient. Ainsi, le projet Watson Oncology Advisor a été récemment mis en place auprès des médecins spécialisés en oncologie thoracique aux États-Unis. « Le but de ce projet est de leur apporter un accompagnement : le système propose des prescriptions en se basant sur toutes les informations disponibles, que ce soit le dossier du patient traité mais aussi toutes les études et tous les cas déjà abordés au sein de l’hôpital. Cela a été rendu possible aux Etats-Unis grâce notamment au Sloan-Kettering, un regroupement d’hôpitaux permettant la mise en commun d’une récolte de près de 15 ans de dossiers et cas répertoriés par chaque établissement concerné. » Et pour mieux préparer, l’avenir IBM se positionne aussi comme un centralisateur d’innovations. En témoigne le lancement de Health Shapr, un programme de financement et de développement d’innovations en santé mobile connectée dédiée aux professionnels de santé (médecins) et aux patients (via associations).

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Claude Larangot-Rouffet : « La technologie peut être une solution pour lutter contre les déserts médicaux »
Présidente de la maison médicale de garde mmg16, membre invitée de la commission 16 de l’Académie de médecine et ancienne membre suppléante du tribunal du Conseil de l’Ordre des medecins, Claude Larangot-Rouffet estime que la technologie soulage déjà le quotidien des patients comme des praticiens. « Il y a 20 ans, le patient s’énervait quand je tapais sur mon ordinateur lors de la consultation alors que ce n’est plus le cas aujourd’hui. De plus, la numérisation et les objets connectés peuvent être une option pertinente pour aider les médecins. Par exemple, les diabétiques ont déjà des applications pour les aider. Si l’un d’eux tombe dans le coma, son carnet de suivi diabétique présent sur son smartphone ou sa tablette permet de savoir le suivi de son taux de glycémie ou encore quelle était la dernière injection d’insuline réalisée avant la perte de conscience. On peut également citer ces pacemakers directement mis en relation avec le PC du médecin qui permettent d’analyser les moments où les patients font un malaise. Cela nous change la vie. »

 

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Si, pour Claude Larangot-Rouffet, la technologie offre un gain de performance certain pour les professionnels, elle est aussi fort utile pour combler les éventuelles inégalités existantes dans l’accès au soin et résoudre les problèmes organisationnelles liés aux faibles effectifs. « Parfois, un CHU de province ne dispose pas d’un chirurgien spécialisé. Pour contrer cela, il existe un robot retransmettant l’image de l’opération vers un chirurgien spécialisé d’un autre établissement afin que ce dernier puisse assister l’opérant. » Même s’il peut être délicat à mettre en place techniquement (qualité des transmissions à garantir, installation de la fibre optique sur le territoire, etc.), le développement de la télé médecine évite aux patients d’enchaîner les allers retours parfois très coûteux. « C’est un gain en économie de santé, en temps, en précision. Ce n’est pas pour rien que certains pays modestes comme le Sénégal ou la Côte d’Ivoire s’y intéressent de très près. »

Dans un autre genre, on assiste également au développement des chambres connectées, permettant aux infirmières de s’occuper de tout le monde plus facilement dans le cas où les patients sont tous répartis dans des chambres uniques, et la présence de bracelets connectés qui alerte le personnel soignant à la place du malade si ce dernier n’est pas en état de le faire. Mieux : pour faire face aux « déserts médicaux » comme aux zones urbaines présentant une trop forte demande d’accès au soin, la France se dote au fur et à mesure de la Consult Station H4D, « une cabine permettant aux patients en attente de consultation de procéder seul à certains tests : détection d’embolie pulmonaire, prise de tension, de température, etc. »

Camille Vaziaga : « Il faut se diriger vers une vraie démocratie sanitaire »
Auteur d’un livre blanc sur le passage « d’un système de santé curatif à un modèle préventif grâce au numérique » en 2014, le think tank Renaissance Numérique dont fait partie Camille Vaziaga pense que la santé du futur devra « accompagner davantage le citoyen » et se renouveler pour répondre aux besoins des malades comme au « mécontentement » personnel soignant. « Le système de santé n’est aujourd’hui plus adapté à certaines pathologies, juge Camille Vaziaga. Cela concerne notamment des maladies chroniques comme le diabète et l’hypertension qui, en plus d’exploser ces dernières années, doivent engendrer un suivi continu et adapté au mode de vie des gens concernés. Le numérique fait aussi qu’on a un peu plus d’autonomie dans nos vies de tous les jours, il n’est donc pas étonnant qu’on cherche aussi à obtenir cette autonomie dans notre santé/médecine. Les associations de patients doivent aussi de plus en plus peser dans la prise de décision des lois santé : il faut se diriger vers une vraie démocratie sanitaire. »

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Pour la déléguée générale, cette mutation du système de santé passera par plusieurs points : le renforcement du suivi à distance, le repositionnement du coaching santé (« si campagne de prévention il doit y avoir, il faut cibler davantage le public et s’adresser à lui de façon différente, grâce aux données récoltées »), le développement d’une médecine personnalisée (« pour éviter de redonner en permanence toutes ses informations à chaque consultation, en cas de changement d’interlocuteur et de lieu de soin »), des réflexions autour de l’usage de l’open data (« selon l’association Transparence Santé, le scandale du Mediator aurait pu être prévenu en observant les prescriptions anormales délivrées sur certaines zones ») ou encore l’appel au Big Data (« en analysant les données de transports – avions, voitures, trains, bateaux -, on peut mieux comprendre la diffusion d’une épidémie »).

 

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